Cercles et spirales
« Le Yin s’enracine, le Yang s’élève ; la spirale les unit. »
Les fondamentaux du Taijiquan et des arts martiaux internes
Au cœur du Taijiquan et des arts martiaux internes se trouve une dynamique essentielle : le mouvement circulaire et spiralé.
Contrairement aux actions linéaires et segmentées, ces arts reposent sur des trajectoires continues, souples et cohérentes, reliant chaque partie du corps dans une unité vivante et fonctionnelle.
Le cercle et la spirale ne sont pas de simples formes extérieures. Ils expriment un principe interne profond, à la fois énergétique, biomécanique et symbolique, qui structure le mouvement, la circulation de l’énergie et l’intention.
Les bienfaits physiques et énergétiques du travail en cercles et spirales dans la pratique
Dans le Taijiquan et les arts internes, les cercles et les spirales ne sont pas seulement une manière de bouger : ils constituent le moteur profond de la transformation du corps et de l’énergie.
Bienfaits physiques
Le mouvement circulaire protège les articulations.
En évitant les angles droits et les tensions brusques, il favorise une mobilité fluide, continue et respectueuse du corps. Les hanches, la colonne vertébrale, les épaules et les genoux gagnent progressivement en souplesse et en amplitude.
Le travail en spirale engage les chaînes musculaires profondes et les tissus conjonctifs.
La force ne provient plus d’une contraction isolée, mais d’une coordination globale du corps, développant une puissance douce, stable et durable, tout en améliorant l’équilibre, l’ancrage et l’alignement postural.
Les spirales soutiennent également les torsions naturelles de la colonne, entretiennent la mobilité vertébrale, libèrent les tensions profondes et favorisent une respiration plus ample et plus libre.
Bienfaits énergétiques
Sur le plan énergétique, les cercles et les spirales ouvrent et entretiennent les voies de circulation du Qi.
L’énergie ne stagne pas : elle s’enroule, se déploie, se transforme et circule de manière continue dans tout le corps.
Le mouvement spiralé permet de :
– relier le centre aux extrémités,
– harmoniser le haut et le bas,
– équilibrer le Yin et le Yang dans l’action.
Avec la pratique, le Qi devient plus abondant et plus perceptible.
Une sensation de volume interne apparaît, comme si le corps se remplissait de l’intérieur avant de s’exprimer à l’extérieur.
Le bassin et le Dantian jouent un rôle central dans cette dynamique.
C’est de là que la spirale prend naissance, s’organise et se diffuse dans l’ensemble du corps, nourrissant les organes et stabilisant l’énergie vitale.
Yin-Yang et transformations continues
Les courbes et les alternances du mouvement sont synthétisées dans le symbole du Taiji, communément appelé Yin-Yang. Il illustre le principe fondamental de transformation permanente : chaque polarité contient le germe de son opposé.
Dans le mouvement, cela se traduit par une alternance fluide entre gauche et droite, haut et bas, vide et plein, tout en conservant une continuité ininterrompue.
Le corps devient alors un champ de transformations, où aucune partie n’agit de manière isolée. Chaque cercle se relie à un autre, chaque spirale en engendre une nouvelle, créant un réseau de forces internes harmonisées.
Circulation du Qi et structuration interne
Les cercles du Taijiquan ne sont pas seulement des trajectoires mécaniques : ils constituent de véritables canaux de circulation du Qi.
À mesure que la pratique s’affine, l’énergie circule plus librement, plus abondamment et plus profondément. Cette circulation génère une sensation de plénitude interne, comme si le corps se structurait et se densifiait de l’intérieur vers l’extérieur.
Le pratiquant ne « pousse » plus avec la force musculaire.
Il mobilise une énergie globale, issue de la coordination entre le sol, le centre et les extrémités. Le mouvement devient à la fois léger et puissant, souple et stable.
Spirales, torsions et conscience corporelle
La pratique régulière des mouvements circulaires et spiralés favorise :
- l’assouplissement progressif des articulations,
- la libération des tensions profondes,
- le développement des chaînes de torsion naturelles du corps.
Une attention particulière est portée aux pieds, véritables racines du mouvement.
Les appuis se transfèrent d’un pied à l’autre de manière progressive, créant une trajectoire d’un côté à l’autre qui initie le mouvement circulaire. Ce transfert commence par un relâchement conscient, accompagné de l’expiration, permettant au poids de s’ancrer dans le sol et d’établir une relation stable et vivante avec la terre.
À partir de cette connexion, une poussée douce et continue du sol s’organise, sans force excessive. Le mouvement circulaire se transforme alors en spirale — Chansijing, le déroulé du fil de soie. Il ne s’agit pas de pousser, mais de laisser le sol répondre, générant une force qui remonte naturellement vers le bassin.
Le bassin devient ainsi le centre de transmission entre le bas et le haut du corps.
C’est à partir de ce centre que le mouvement se structure et s’harmonise. Les spirales prennent naissance dans le bassin, se propagent le long de la colonne vertébrale, puis se diffusent progressivement dans les bras et les jambes, jusqu’aux extrémités.
Le mouvement n’est alors plus fragmenté. Il s’enracine dans le sol, s’organise au centre et s’exprime dans tout le corps, dans une continuité fluide reliant appuis, souffle, structure et énergie.
« Le pied s’enracine, le centre transforme, les membres révèlent. »»
Song ARUN